Ciné Télé Revue, 14 juin 2001

 

« Roméo & Juliette »

Le triomphe des amants de Vérone

 

Après avoir déchaîné l’enthousiasme à Paris, la comédie musicale fait rêver des milliers de Belges à Forest National.

 

Après le Palais des Congrès de Paris, Forest National vibre au rythme de « Roméo et Juliette », la comédie musicale la plus romantique du début du millénaire. Une superproduction encore plus grandiose que « Notre Dame de Paris », avec treize chanteurs solistes (800 jeunes talents ont passé l’audition) et une cinquantaine de danseurs et d’acrobates.

 

Quatre millions de disques ont été vendus (le single « Aimer » est sur les ondes depuis mars 2000, il a été suivi par « Les rois du monde », en juillet, et « Vérone », le mois passé !) et la salle parisienne a affiché complet pour trois mois, ce qui fait 370 000 places réservées. Forte de cette demande, la production a pris une option sur les lieux jusqu’à fin mai. Puis, le spectacle reviendra en juillet, et d’octobre à décembre 2001. C’est dire si les créateurs y croient.

 

Le public, lui, est conquis. Par les textes, qui expriment nos tourments face aux difficultés de l’existence. On a là tous les sentiments : l’amour, la haine, la jalousie, la violence, l’innocence. Et par la mise en scène, grandiose. A la fin de chaque représentation, les spectateurs restent debout, longtemps, face aux artistes à l’origine du rêve.

 

Pour Gérard Presgurvic (47 ans), ce succès est une résurrection. « Shakespeare m’a sauvé », dit-il. « Ma femme, Evelyne, a eu cette idée miraculeuse, à laquelle je n’ai d’abord pas cru. Elle savait que je rêvais depuis 20 ans de m’atteler à une comédie musicale et elle cherchait des solutions pour que j’échappe au gouffre moral et financier dans lequel j’allais sombrer. » Tout n’allait effectivement pas pour le mieux pour l’auteur de Bruel (on lui doit l’album « Alors regarde ») et du tube que Yannick a remis au goût du jour, « Chacun fait ce qui lui plaît » : « je ne travaillais quasiment plus depuis des années. Tout l’argent gagné jadis avait été perdu dans de mauvaises affaires et le métier me considérait comme un has been. Je vivotais en faisant quelques galas a capella derrière les chanteuses à la mode recrutées par les discothèques. Les huissiers faisaient le siège de la maison. » Il n’a désormais plus de souci à se faire : l’Allemagne, le Canada, la Hollande et le Japon ont d’ores et déjà acquis les droits, et le spectacle sera monté à Londres en février 2002. Ses rois du monde ont gagné le combat…

 

Pour faire partie de la troupe, il faut une voix, mais aussi un physique. Pour camper Roméo, le choix s’est campé sur Damien Sargue, 19 ans, grand, beau et brun. « Il est apparu comme une évidence », précise Presgurvic. Le jeune homme est devenu une star bien avant la première de « Roméo et Juliette », mais il n’est pas un novice dans le domaine des comédies musicales : il a été, durant quelques 80 représentations, la doublure de Phoebus et de Gringoire dans « Notre-dame de Paris ». « Comme Patrick Fiori et Bruno Pelletier jonglaient avec leur carrière solo, j’ai eu la chance de pouvoir monter régulièrement sur scène », explique-t-il. « J’y ai énormément appris. » A 8 ans déjà, Damien était inscrit à l’école de variétés de Caen, sa ville natale. 2 ans plus tard, sous le nom de Damien Danza, il cartonnait aux « N°1 de demain », une séquence de « Sacrée soirée ». Depuis, il vit pour la musique. Fils d’un agent immobilier et d’un entrepreneur dans le bâtiment (mais ses parents ont divorcé alors qu’il avait 1 an), ce passionné de karaté a grandi en Normandie, où, tout gamin déjà, il faisait craquer des cœurs. Hélène Ségara, de 9 ans son aînée, a elle aussi succombé, mais leur belle romance appartient déjà aussi au passé. « Je n’aimerais pas que ça devienne l’histoire bis de Lara-Patrick », avait-il confié alors que c’était l’amour fou. « On n’a rien à cacher, mais pour préserver notre vie privée, on se protège ». Pas assez vraisemblablement. « Les gens heureux dérangent », constate-t-il aujourd’hui. « J’en ai hélas fait l’expérience. Mais je deviens de moins en moins naïf. Avec tout ce qui m’est arrivé, je vois plus les pièges qu’on me tend ». De son personnage, ce bosseur aux origines espagnoles dit : « C’est un mec qui a bourlingué, qui s’est fait plusieurs nanas. Il connaît les secrets des femmes mais n’en a aimé aucune. Il s’est vite lassé de toutes et il cherche le grand amour, tout en faisant la fête avec ses potes. Un peu comme moi… »

 

Quand à Cécilia Cara, elle a tapé dans l’œil des producteurs lors de son passage à « Graines de star » sur M6. Elle s’est imposée dans le rôle de Juliette au fil des répétitions. « Nous voulions recruter des artistes inconnus et français de préférence », expliquent les producteurs. « Histoire de ne pas rapatrier tout le Québec à Paris ! » Pour Gérard Presgurvic, elle est un ange. Et tout comme Damien Sargue, elle possède les qualités de son personnage : candeur, beauté et courage. « Elle est surprenante », dit encore le compositeur. « J’ai réécris des scènes à 2 jours de la première et, une heure après, elle répétait avec un vrai talent. » A 4 ans déjà, Cécilia débutait dans un spectacle de danse. Elle a ensuite participé à de nombreux galas et concours dans la région cannoise (où elle est née le 5 juin 1984). « J’ai gagné toute une collection de coupes », confie-t-elle. « Sur scène, je me sentais bien, à l’aise, un peu comme ma 2ème maison. »

 

Fille unique, élève modèle qui suit désormais ses cours par correspondance, Cécilia avoue ne pas avoir de fiancé et préfère visiter les églises plutôt que de se montrer dans les boîtes à la mode. « Au risque de paraître fleur bleue, je crois à l’amour avec un grand A », précise la jeune héroïne. « Le coup de foudre, c’est magique ! Le romantisme, c’est plein de petites attentions qui se manifestent au quotidien. Je connais des filles qui trouvent ça ringard et qui ne se contentent que de l’apparence physique. Pas moi. » Douce et déterminée, elle s’est imprégnée de son rôle en visitant Vérone avec Damien Sargue, mais aussi Stratford-Upon-Avon, la ville natale de Shakespeare. « Je vais vivre à fond l’aventure. Même s’il n’y a pas de suite, lorsque je serais vieille, je pourrais raconter à mes petits-enfants : j’ai été la Juliette du 3ème millénaire. »

 

 

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